Ça y est, c’est les vacances et après de longs mois d’attente, le cinéma peut enfin respirer ! La réouverture a eu lieu et les boissons, chips et autres produits à grignoter vous sont proposés. N’hésitez pas à soutenir ce secteur et passez un bon moment en famille, au cinéma « Nos Loisirs ».
Bonjour, pourriez-vous vous présenter ?
Bonjour, je suis Philippe cadet, j’ai 50 ans, je suis marié, j’ai deux enfants. Je suis actif dans le cinéma familial depuis l’âge de 16 ans. J’ai commencé comme projectionniste. J’étais là pour dépanner et maintenant, je m’investis énormément dans la gestion de la salle à Saint-Mard. J’ai un rôle de gestionnaire et de co-programmation avec mon père. Mais ce n’est pas mon boulot principal, je suis aussi éducateur dans le secteur de l’aide à la jeunesse. J’y accompagne des familles en difficulté et on fait des projets et animations dans les écoles.
Mais en quoi consiste votre métier de gestionnaire et de Co-programmation ?
Je fais un peu de tout. Il y a le côté financier et administratif. Et puis il y a l’autre aspect. Il faut organiser les séances. Moi, je fais particulièrement la projection du week-end. Souvent, je fais les séances tout seul. Puis il faut nettoyer la salle, s’occuper du bar et de l’accueil des clients. Je vais aussi de temps en temps dépanner au « Ciné-Patria » à Virton.
Une formation, est-elle nécessaire pour faire ce métier ?
Pas forcément. J’ai appris avec ma famille, on est né dedans avec mes frères. Mes parents nous ont habitués à voir des films de toutes sortes. Sinon, moi j’ai été une année à l’école à Bruxelles et j’allais plus au cinéma qu’à l’école… (rires) J’ai appris à aimer des réalisateurs comme Claude Lelouch, Ken Loach, Clint Eastwood et bien d’autres… Ce sont des choses qu’on apprend avec la découverte, c’est un peu comme la littérature. Et dans la famille, on n’a pas honte d’aimer des films de toutes les sortes. Mes parents vont rire à des comédies françaises plutôt commerciales, mais en même temps, ils sauront apprécier un film d’auteur. Bref, on est tombés là-dedans quand on était petits…
Et auriez-vous un rêve d’enfance ?
Moi, j’ai toujours rêvé de vivre du cinéma, de faire ça à temps plein. Mais ce n’est pas sécurisant et on le voit encore plus avec la pandémie. Il faut qu’il y ait du choix de films, que les gens nous suivent, mais une question se pose toujours. Est-ce que le cinéma va continuer à être ce qu’il est maintenant ? Avec l’émergence des streamings, c’est un peu compliqué. Puis, nous, on fait un peu de l’Horeca aussi. On vend des boissons, on va créer de l’événement. Ce qui marche surtout pour nous, ce sont les grosses sorties et les événements. Des soirées after, des événements pour les petits, les grands… L’événement, il n’y a que ça qui fonctionne.
Quelle est la différence entre le « Ciné Patria » et le « Ciné Nos Loisirs » ?
Nous avons un balcon qu’il n’y a plus à Virton. Les sièges sont aussi confortables des deux côtés, le son est le même, mais l’écran un peu plus grand à Virton. Ici, il y a un balcon et 210 places, il y en a 179 à Virton. Les programmations changent parfois.
Films ou série ?
Film. Quoique, le confinement m’a appris à aimer des séries françaises. J’ai apprécié « En thérapie », « Dix pour cent » …
Et votre film préféré ?
J’en ait plusieurs, mais je dirais « Le fabuleux destin d’Amélie poulain ». Et tous les films de Claude Lellouche : « Tout ça pour ça », « L’itinéraire d’un enfant gâté ». Ici, on a présenté aussi « Adieu les cons » d’Albert Dupontel, un fameux réalisateur. J’ai bien aimé aussi.
Pellicule ou numérique ?
Le numérique, c’est beaucoup mieux. Ça a une meilleure qualité d’image, vous pouvez jouer le film 150 fois, vous n’aurez jamais une différence de qualité. Ce qui était le cas à l’époque… Donc je ne suis pas du tout un nostalgique de la pellicule. Moi qui aie fait projectionniste, avec le numérique, la projection est un jeu d’enfant.
Comment organiser une soirée cinéma parfaite ?
On choisit soit un thème soit un film qui attire une clientèle particulière. On le programme longtemps à l’avance et on propose des préventes. Pour la mise en avant, on travaille encore avec la gazette, la radio Peps et nos pages Instagram.
Avez-vous pu proposer des alternatives avec la crise du Covid ?
Pas du tout. Même louer la salle privativement, des gens nous l’ont demandé, mais on ne pouvait pas. On a tout de même vendu des places pour les gens qui sont revenus à la réouverture. On est ravis de les retrouver !
Avez-vous une idée de l’avenir du cinéma ?
Je pense qu’on va devoir se réinventer un peu. Dans la création d’événement notamment. Peut-être laisser de temps en temps nos salles à du gaming, proposer des débats… Puis la question, c’est : est-ce qu’à un moment donné, on ne sera pas poussés à faire la diffusion de séries en avant-première dans les cinémas ? Lors de soirées par exemple. Ça peut être intéressant.
Comment obtenez-vous les droits de diffusion d’un film ?
C’est la maison de film qui obtient les droits et nous, on a un accord avec la maison de film. Une fois qu’on a l’accord, on peut le projeter autant de fois qu’on le souhaite. Évidemment, il y a des droits d’auteur qui sont payés chaque fois par le biais de la maison de distribution. Nous, on paye des droits d’auteur pour la diffusion de la musique dans la salle. Pour les films, on paye un pourcentage sur la recette. Ils prennent 50 %. Le risque, c’est cela. Car quoi qu’il arrive, nos dépenses restent les mêmes. Les frais de pub, les frais généraux, le personnel, etc.
Travaillez-vous avec des maisons de distribution particulières ?
Il y en a des Belges et des internationales (Disney, Sony, Belga…). Et pour au moins 5 d’entre elles, nous avons systématiquement toutes les sorties chez eux. Il reste un gros point d’interrogation sur Disney. Vont-ils continuer à travailler avec le cinéma ou vont-ils tout faire passer sur « Disney Plus » ? Ce qui serait une énorme économie pour eux et il faut les comprendre. Ça leur éviterait toute la communication sur le film, la pub, les affiches… Et risquer que le film ne fonctionne pas du tout. Maintenant, l’autre travers c’est que si un film fonctionne au cinéma, il fonctionne automatiquement sur la télé. Puis les gens aiment quand même bien voir l’image en grand écran. Donc Disney, c’est notre crainte à tous. Maintenant, il n’y a pas qu’eux, et d’autres vont peut-être en profiter pour prendre leur place au cinéma.
Selectionnez-vous les films que vous diffusez selon certains critères ?
Les maisons de distribution vont nous proposer des sorties nationales. Nous, on est un peu éclectiques ; on aura des programmations un peu commerciales, d’autres un peu plus « ciné-club », qui suscitent le débat. Des films de tous les genres, rares ou moins rares. On est le reflet d’un public qui nous correspond et que l’on finit par connaître. Et les événements nous permettent une certaine diversité.
En parlant des événements, que sont les mardis du festival ?
Le festival du film européen se déroule la deuxième 15 aine de novembre. Ça dure une dizaine de jours et 35 films européens sont proposés. Les mardis du festival, c’est l’occasion de voir deux films programmés qui ne seront programmés que deux fois. Et qui ne sont pas forcément Européens. Nous sommes labellisées « Europa Cinemas ». Donc on va devoir publier un minimum de films et de dessins animés européens.
Et que sont les films coup de cœur ?
Ce sont des films pour lesquels on a eu un coup de cœur. Les gens ont des réductions s’ils viennent voir un « coup de cœur ». Ce sont souvent des films européens.
Quel est le point le plus positif de ce métier ?
Le contact avec les gens. Oui, qu’est-ce qu’il y a de plus agréable à voir une maman ou un papa qui a pris du bonheur à emmener son enfant voir un film ? Ou un couple, une personne seule qui est allé voir un film et qui ressort en ayant adoré et nous dit « Merci pour ce moment » ? Ça, c’est la meilleure chose.
Un mot pour la fin ?
On touche du bois, on croise les doigts pour que ça redémarre correctement. On est assez optimiste parce que les gens nous ont acheté énormément de places en prévente. Pour ça, on ne les remerciera jamais assez, et on est heureux qu’ils reviennent voir les films. Et c’est bien que l’on puisse vendre nos chips et nos bières. Parce qu’elles s’impatientaient ! (rires)
Maureen Bertrand
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